24h de bus. Deux looping de cadran. C’est le temps qu’il nous a fallu pour arriver à Buenos Aires. Heureusement qu’on était installés au premier rang à l’étage et que les paysages sont fascinants. Des heures de végétations tropicales avec quelques cahutes en bord de route et une ville à l’occasion. On en prend plein les mirettes, enfin surtout moi car mon copilote a tendance à devenir narcoleptique dans les transports.
On déboule donc à BA vers 11h dans une gare routière miteuse. Il fait moins chaud qu’au Brésil, les gens parlent espagnol – ça semble presque trop facile. Il ne nous reste plus qu’à nous diriger vers notre nouveau chez nous : le Airbnb de Cristian que nous partagerons avec Pierre le Suisse et Milkman qui sans le savoir est en train de devenir notre énorme private joke du voyage.
Quel plaisir de rester 8 jours au même endroit. En plus il y a une cuisine à peu près équipée et mine de rien on commence à rêver de choses simples, peu grasses, avec des légumes, et réalisées par nos soins (pâtes fraîches au basilic avec légumes du soleil grillés et un petit Malbec argentin dès le premier soir keskiaaaaaaaa). Pour le reste, l’appart est décoré avec gout et se situe à 100m du métro. La tanière est parfaite pour explorer notre nouveau terrain de jeu.
Comme toute grande ville, Buenos Aires a divers visages. Voici les portraits qu’on lui a tiré en 8 jours :
El Centro – l’artère et l’aorte
La première avenue qu’on a arpenté c’est celle du 25 de mayo, jour sacré qui a vu naître la première forme de gouvernement local, le début de l’indépendance argentine. C’est l’artère de la ville, et on pourrait dire que l’avenue du 9 de julio (no sé lo qué paso ce jour la, renseignez-vous bordel) en est l’aorte, les deux étant perpendiculaires. Ces deux avenues sont jonchées de bâtiments historiques aux façades clinquantes ornées de moulures, des statues à la gloire des héros disparus, et une multitude de cafés, restaurants, cavistes et boutiques de bon goût. Il y a dans le centre et dans les quartiers huppés de BA un léger parfum de Paris saveur 90’s. L’avenue du 25 de mayo, mène à la Plaza de mayo que surplombe la Casa Rosada, là où siège le pouvoir.
Comme toute artère, l’avenue du 25 de mayo finit souvent bouchée. Notre coloc Pierre le Suisse qui était à BA depuis 6 mois nous a fait un rapide topo de la situation politico-économique du pays : l’état argentin est gravement endetté, il a un moment refusé de payer sa dette et a subi les foudres du marché mondial avec des malus en import / export (les produits électroniques coûtent excessivement cher, le pesto barilla aussi), il a depuis peu accepté de rembourser sa dette mais 60% de la population étant employé / rémunéré par l’état, il est difficile de faire des économies sans que le peuple trinque (réduction des aides, suppression des retraites, etc.). Bref c’est pas la joie, d’autant plus que les retraits bancaires sont limités et que le taux de change fluctue plus que le niveau de jeu de l’OL cette saison. On a donc un peuple marqué par une histoire sanglante, doublé d’un présent sans garanties, triplé par des histoires de corruption à tête de l’état : de quoi faire un bon cocktail molotov. En huit jour on a pas vraiment eu le temps de ressentir tout ça, mais on a eu la chance de voir les argentins à l’oeuvre pour le « Jour de la Mémoire, de la Vérité et de la Justice ». L’hommage rendu aux victimes de la dictature argentine mobilise chaque année tout le pays. Pour la petite histoire, le 24 Mars 1976, Isabel Peron alors présidente de l’Argentine est chassée du pouvoir par les militaires du général Jorge Rafael Videla. Six années durant, l’Argentine est plongée dans une dictature militaire qui sera marquée par la disparition de 30 000 personnes. Artère & aorte bouchées par des milliers de gens qui s’accordent sur un point : plus jamais ça.
Le Centro abrite aussi de nombreux musées, gratuits pour la plupart (et très peu chers quand payant) ainsi que le réputé Teatro Colon où on est allés fêter mon anniversaire avec une petite symphonie de Rossini : un anniversaire de daron pour mes 29 piges, l’année prochaine je casse tout pour les 30 ans.
La Reserva Ecologica
En continuant tout droit après la Casa Rosada on s’approche du littoral. On rêvait de se baigner depuis notre arrivée, mais on comprend rapidement que ce ne sera pas à Buenos Aires : zéro Playa dans la Ciudad. Pour les stations balnéaires les plus proches il faut compter 1 à 2h de transport. Tant pis on se rattrapera en Equateur. A défaut d’arriver sur une plage, on traverse un éco-quartier jalonné de canaux puis d’immenses building, le tout donnant sur une réserve écologique où les argentins aiment bien se balader le weekend, et depuis laquelle on aperçoit enfin l’océan. En chemin on a croisé Messi que j’ai taclé sans pression.
Bons baisers de San Telmo
San Telmo c’est LE quartier coup de coeur. La légende raconte que le tango est né là-bas, dans la misère et les cris. Aujourd’hui c’est un quartier touristique d’essence populaire, qui abrite beaucoup de bars & cafés, un marché couvert où l’on a pu s’envoyer une paella, des calamars frits, une crêpe au dulce de leche (la nouvelle passion de Solène), tous les antiquaires de la ville dont certains sont nichés dans des passages pittoresques, et des boutiques de créateurs. Les façades sont colorées, on entend de la musique par ci par là, et le dimanche tout le secteur est bouclé pour laisser place à un marché grouillant de monde.
Alerte à Palermo
Palermo c’est le quartier jeune et branché de BA. Résidentiel mais vivant, Palermo alterne entre espaces verts, immeubles derniers cris, villas cossues et terrasses. On y a visité le jardin botanique, le jardin japonais et le musée d’art moderne latino-américain.En manque de musique, RA nous a aussi guidé là-bas, pour une soirée ou y avait RAS.
Enterrez-moi à Recoleta
Avec Palermo, Recoleta est l’autre quartier riche du nord de la ville. Moins jeune, plus bourgeois, Recoleta vaut principalement pour son cimetière. On a déambulé quelques heures durant dans les couloirs de la mort à la recherche de la plus belle tombe. Askip on emporte pas ses millions au paradis du coup les types claquent tout leur bif ici bas pour construire des mausolées pharaoniques. Suite à cette visite (+ après avoir vu Coco dans l’avion) on a décidé d’ouvrir un plan épargne logement post-mortem, histoire de pourrir OKLM dans un endroit qui a de la gueule.
En sortant du cimetière on a fait la connaissance de Belen, une petite blonde du Paraguay qui sortait son chien. En plus d’une visite guidée du quartier, de la faculté de droit et de la Floralis Genérica (une sorte de fleur géante en aluminium, un super spot photo touriste), cette rencontre nous a aussi permis de hablar un poquito el espanol madre mia.
Boca la loca
Quartier ouvrier fondé par des (im)migrants italiens, la Boca abrite le club de foot le plus populaire d’Argentine : Boca Junior. Prenez un clasico OM-PSG au vélodrome dans les années 90, multipliez la ferveur par 32 et vous obtenez une vague idée de la furie qui règne dans les travées de la Bombonera pendant un Boca Junior – River Plate. Il y a du bleu et du jaune sur presque tous les murs dans un rayon de 2 km aux abords du stade, des portraits géants de Maradonna, Riquelme, Tevez, etc. Ca pue le foot et j’adore ça. J’aurais payé cher pour voir un match, malheureusement -trêve internationale oblige- je n’ai eu le droit qu’à Espagne-Argentine dans un bar avec un score final de 6-1 pour le royaume. A trois mois du mondial, la presse argentine reproche à Sampaoli d’avoir perdu beaucoup de temps pour in fine pondre une équipe vieillissante et assez semblable à celle qui a perdu la finale en 2014. Les gens n’attendent plus grand chose de Messi qui joue « avec un canon sur la tempe » en sélection. Peu d’espoir pour ce mondial, mais attention mon petit Didier, la bête est dangereuse quand la bête est blessée, et si on les croise en 1/8 ou en 1/4 -prudence- ils ont quand même de quoi t’arracher tes dernières dents.
Dès que ça parle foot on s’étale, on s’épanche, mais sinon La Boca c’est aussi el Caminoto, un petit marché multicolore ou l’artisanat et la musique sont mis à l’honneur. Il semblerait que Benito Quinquela Martin ait marqué de son empreinte le quartier en peignant les murs et parfois le sol de ces couleurs pastels dont on ne sait plus si elles sont vives ou délavées à force de baigner dedans. Le musée lui rendant hommage permet de mieux comprendre le quartier et son oeuvre : Benito a semble t-il souhaité remplacer le noir de la suif, du charbon, de la fumée, par un arc-en-ciel censé redonner un peu de baume au coeur et de dignité à la population. Aujourd’hui le quartier est touristique en journée mais mieux vaut ne pas trop niaiser par là une fois la nuit tombée.
Côté pratique, après 8 jours à BA on peut dire que le métro qui coûte moins de 40 cts par trajet est très efficace, la plupart des musées sont gratuits ou peu cher, la viande rouge ne coûte pas grand chose, le vin argentin est vraiment bon dès lors qu’on tape dans les bouteilles de plus de 7-8€. Côté fruits & légumes ça tire grave la tronche, idem pour le pain, les yaourts, les gâteaux, etc. Les cafés et resto coûtent sensiblement la même chose que dans une ville comme Lyon. Le wifi fonctionne pas trop mal. Les banques sont calamiteuses et vous ponctionnent 6€ de frais « étatique » (il faut bien renflouer les caisses) à chaque retrait + Payer par carte est complexe dans un commerce sur 2.
BA la magnifique pourrait donc être plus belle encore, mais on préférera dire que ce petit côté désuet participe à son charme, et franchement tant qu’il y a du boeuf saignant et du bon vin, qui se soucie du reste ?
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